Laurent Bernard, Avocat fiscaliste au cabinet Portalis

Taxer la plus-value

Imaginez le cas d’un indépendant qui décide de passer en société. Il possède un immeuble dans lequel il exerçait son activité. Il décide à présent de le louer à sa société. Quelque temps plus tard, il revend son bien à la société ou à un tiers. Résultat : l’administration tente de taxer la plus-value réalisée à cette occasion au taux de 16,5 %. La loi prévoit en effet qu’en cas de vente d’un immeuble affecté à l’activité professionnelle à la cessation de cette activité, la plus-value réalisée est imposable en tant que plus-value de cessation.

La jurisprudence

Cependant, comme le précise Laurent Bernard, avocat fiscaliste au cabinet Portalis, « la loi stipule aussi que, pour être imposable, la plus-value doit nécessairement être réalisée "en raison de" ou "à l’occasion de" la cessation de l’activité professionnelle. Et c’est à l’administration fiscale de prouver le lien étroit entre la cessation d’activité et la vente de l’immeuble. » Par conséquent, les plus-values ne sont pas imposables lorsque l’immeuble est affecté de manière durable et exclusive à des fins non professionnelles entre la date de la cessation d’activité de l’indépendant et la date de la vente de l’immeuble.

La position de la jurisprudence a d’ailleurs évolué ces dernières années. Désormais, le lien entre la cessation d’activité et l’aliénation de l’immeuble n’existe plus lorsque, après la cessation de son activité professionnelle, le contribuable donne l’immeuble en location à la société qu’il a constituée. Ceci est le cas même si une partie des revenus de location est requalifiée en revenus de dirigeant d’entreprise. Le seul fait de donner un bien immobilier en location n’est donc pas constitutif d’une activité professionnelle. Le fait que le contribuable soit le gérant de la société n’est pas plus pertinent pour juger de l’éventuel caractère imposable de la plus-value.

Par conséquent, conclut notre interlocuteur, « l’octroi d’un bail à la société dont le contribuable est le gérant n’empêche nullement que le bien rentre dans son patrimoine privé. » Et, en clair, la plus-value réalisée lors de la cession ne pourra pas être taxée.