Jan Tuerlinckx,
Managing partner chez Tuerlinckx Avocats Fiscalistes

 

Préambule

« L’insécurité découle en grande partie des changements survenus en matière de frais déductibles et d’optimisation des rémunérations des dirigeants d’entreprise. L’assouplissement de la réglementation relative à la cotisation spéciale sur commissions secrètes était une première étape en la matière », entame Jan Tuerlinckx.

« À la mi-2014 et en 2015, il y avait en outre du pain sur la planche pour ce qui concerne la jurisprudence de la Cour de Cassation, dont on pouvait par exemple conclure qu’une société de médecins pouvait déduire un appartement à la mer. Mais la Cour de Cassation a pris un virage à 90 degrés par rapport à la théorie, stipulant que les frais sans rapport avec les activités prévues dans les statuts d’une entreprise peuvent, eux aussi, bénéficier d’une déduction fiscale. »

 

Nous craignons que la théorie de la rémunération
divise les dirigeants d’entreprise et le fisc.

 

Conséquence : la théorie de la rémunération

Jan Tuerlinckx : « L’administration fiscale a alors avancé la théorie de la rémunération en réaction. Selon cette théorie, lorsqu’un avantage est octroyé à un dirigeant d’entreprise, ce dernier doit pouvoir prouver qu’il a effectivement fourni des prestations supplémentaires, qui justifient cette rétribution supplémentaire. La question se pose toutefois de savoir quand cette rétribution supplémentaire est méritée. Nous avons le sentiment que l’administration fiscale entend désormais utiliser cette théorie comme l’outil par excellence contre l’optimisation des rémunérations des dirigeants d’entreprise. »

 

Conseil aux dirigeants d’entreprise

« Dans le cadre de l’optimisation d’un avantage de toute nature, nous conseillons de documenter très solidement le pourquoi de son attribution au moment même de son attribution, et d’également reprendre cette documentation dans l’administration de l’entreprise, les procès-verbaux des assemblées générales ou les conventions. De cette manière, il y aura déjà un document écrit et on aura déjà réfléchi à la justification à donner si jamais un contrôle devait être effectué », poursuit Jan Tuerlinckx.

 

Et ensuite ?

« Nous craignons que la théorie de la rémunération divise les dirigeants d’entreprise et le fisc. L’insécurité juridique risque bien de perdurer un certain temps, car il est particulièrement difficile de démontrer pourquoi telle ou telle personne mérite une rétribution complémentaire. Sauf, bien sûr, si une initiative légale devait intervenir entre-temps. Mais à l’heure actuelle, le ministre des Finances n’a encore pris aucune position formelle. »