Un expert en communication, un développeur spécialisé, une société de comptabilité : faire appel à des professionnels extérieurs pour gérer certaines tâches est un processus courant. Mots d’ordre ? Confiance, autonomie et empowerment. Les explications de Fred Colantonio, conseiller en entreprise, conférencier et auteur.

L’externalisation est-elle un procédé bénéfique pour l’entreprise ?

Fred Colantonio : « En Belgique, 98 % des sociétés privées actives dans le secteur marchand sont des PME ou des TPE. Il est difficile de tout internaliser dans une entreprise, en particulier si elle est de petite taille. Serait-ce même souhaitable ? S’entourer par l’apport extérieur de ressources est une démarche saine et stratégique.

L’outsourcing permet de jeter un regard neuf sur l’entreprise, d’alléger ses charges fixes, de rester alerte. Il s’agit d’un acte de leadership : accepter que sa société perde partiellement le contrôle sur son activité relève du défi. Mais cette décision est bénéfique et met à profit des talents extérieurs. »

À quoi faut-il faire attention en matière de management en outsourcing ?

F.C. : « Le principal danger est de confondre outsourcing et sous-traitance. Celle-ci consiste à déléguer une tâche dans son entièreté, sans collaboration forte, contrairement à l’externalisation. Comparons ce processus au fait de rouler à vélo : dans le cas de la sous-traitance, l’entreprise demande au sous-traitant de rouler à sa place, là où l’externalisation consiste à pédaler ensemble. »

Quel rôle joue l’externalisation dans la transformation digitale d’une entreprise ?

F.C. : « Le rythme avec lequel les nouvelles technologies évoluent est souvent difficile à suivre pour les entreprises, particulièrement celles éloignées du secteur. Le premier réflexe de nombreuses parmi elles est alors de sous-traiter leur approche digitale. Elles risquent alors de se retrouver avec un produit (site Web, interface, gestion de médias sociaux, etc.) qui ne correspond pas à leur identité ni à leur vision.

Il est essentiel que la société prenne conscience de l’importance de son existence numérique. L’externalisation facilite ici la transformation digitale en offrant des solutions personnalisables et vraiment sur mesure, fruits d’un travail de collaboration. Bénéfice insoupçonné, il arrive que le partenaire externe transmette l’ADN de l’entreprise tout en ayant plus de recul qu’un travailleur interne. »

En quoi l’outsourcing représente-t-il une innovation pour les entreprises ?

F.C. : « Si l’outsourcing mène souvent à des pistes d’innovation, c’est parce que la prise de recul des ressources externes inspire de nouvelles grilles de lecture qui peuvent se transformer en projets valorisables. »

Quels obstacles une entreprise en recherche d’innovation risque-t-elle de rencontrer ?

F.C. : « La première difficulté concerne la perception même de l’innovation, imaginée comme imposante ou hors de portée alors qu’elle concerne généralement des détails du quotidien. Capturer des idées, les organiser en projets et les commercialiser : c’est à la portée de tous. Le deuxième obstacle est le cloisonnement dans un mouchoir de poche géographique déterminé, sans profiter des opportunités de mobilité actuelles. Une idée n’est pas applicable ou rentable en Belgique ? Il suffit parfois de sauter une (ou plusieurs) frontière(s) pour qu’elle fonctionne. Innover consiste à faire quelque chose de différent sur un terrain de jeux existant, ou à faire quelque chose d’existant sur un terrain de jeux différent. »

Comment une innovation se déploie-t-elle ? Quel rôle y joue l’externalisation ?

F.C. : « Trois temps forts caractérisent l’innovation. La première étape est la transgression, la remise en question de l’ordre établi. Un regard extérieur est souvent utile pour la stimuler et proposer une nouvelle opportunité dans un schéma existant. Ensuite viennent les tests : confrontation à la technique, étude de faisabilité, prototypage, etc. L’externalisation permet de comprendre la réalité dans laquelle l’innovation pourra s’intégrer. Enfin, la transmission est la dernière étape : la commercialisation du produit ou du service, sa diffusion, y compris en interne. À chaque étape, l’externalisation joue un rôle-clé. »