Qu’est-ce qu’un Chief Happiness Officer ?

Laurence Vanhée : « Un Chief Happiness Officer est une personne qui est en capacité d’influencer une organisation, sa structure et sa stratégie, et met l’humain au centre des préoccupations. Son rôle est de faire en sorte que les collaborateurs puissent aller piocher tous les éléments nécessaires à leur bonheur et performance dans l’organisation. »

Comment vous est venue cette idée ?

L. V. : « Une longue carrière dans le management m’a amenée à travailler dans plusieurs entreprises. J’ai gravi les échelons pour obtenir des postes à responsabilités, jusqu’à celui de vice-présidente d’une société cotée en bourse. Puis, mon corps m’a lâchée et j’ai fait un burn out. Durant ma reconstruction, je me suis demandée comment j’en étais arrivée là et je me suis promise de ne plus jamais traverser de telles épreuves. J’ai pris connaissance d’une entreprise nommée Zappos. Le CEO de cette société se qualifiait de Chief Happiness Officer. D’abord amusée, je me suis dit que je pouvais utiliser ce nom pour ma reconversion professionnelle. Alors directrice générale du service d’encadrement du personnel au sein d’un service public fédéral, j’ai tenté peu à peu de mettre en application de nouvelles manières de management centrées sur le bonheur au travail. »

Existe-t-il un secret pour être heureux au travail ?

L. V. : « Il n’y a pas de secret ! Mais, par contre, il existe des techniques pour l’atteindre. Un manageur peut changer sa manière de gérer son équipe pour lui laisser plus de liberté dans sa façon de travailler. On parle alors de liberté de temps, de lieu, de rôle et d’outils. C’est-à-dire, permettre à son collaborateur de travailler ailleurs qu’à son bureau, de pouvoir aménager son temps de travail, d’utiliser son propre ordinateur, mais aussi s’investir dans d’autres activités de l’équipe et évoluer dans des rôles qui le satisfont plus. Il est également bon de mettre sur pied des activités sociales. Ça peut aller des sorties en équipes à des activités disponibles dans l’entreprise, comme des cours de Zumba et des séances de relaxation. En donnant de la liberté, on permet aux collaborateurs de se responsabiliser et cela se traduit presque toujours par un sentiment de bonheur et une augmentation des performances. »

Des études montrent qu’un collaborateur heureux est 2 fois moins malade, 6 fois moins absent et 30 % plus productif

Le bonheur est donc du ressort du manageur ?

L. V. : « Entre autres, mais pas seulement. L’employé lui aussi peut devenir acteur de son propre bonheur. Dans les exemples cités précédemment, on peut déjà voir que l’employé a une marge de manœuvre qu’il peut explorer. Il est donc déjà acteur. Il peut aussi se poser des questions telles que "Qu’est-ce que je fais bien ?", "Où sont mes talents ?", "Qu’est-ce qui est utile à l’organisation ?" ou "Qu’est-ce que j’aime faire ?". En combinant les différentes réponses, il peut trouver des pistes d’évolution qui lui permettront de s’épanouir. Évidemment, le manageur doit être sincère et courageux face à ces demandes, car une bonne équipe est une collaboration d’êtres humains uniques qui doivent se sentir reconnus et valorisés dans leur travail. »

Trouvez-vous qu’on sous-estime encore trop les vertus de l’épanouissement au travail ?

L. V. : « Tout à fait. On a tendance à se concentrer sur la productivité d’un service sans comprendre que le bonheur est un vecteur de cette même productivité. Des études montrent qu’un collaborateur heureux est 2 fois moins malade, 6 fois moins absent et 30 % plus productif. On évite également les burn out ou les bore out qui privent bien souvent les équipes d’éléments importants. »